Leçons à tirer de la ruée sur les banques du mois de mars
Alfred Lam, MBA, CFA Vice-président principal et directeur de l’équipe de Gestion d’actifs multiples, Gestion mondiale d'actifs CI
Les investisseurs ont commencé l’année avec la conviction extrêmement optimiste qu’un atterrissage en douceur de l’économie américaine se produirait avec un ralentissement de l’inflation et que la Réserve fédérale américaine était sur le point de mettre fin à la hausse des taux. L’indice S&P 500 a atteint 4 180 au cours du trimestre (voir le tableau ci-dessous). Ces prévisions optimistes ont ensuite été remises en question par la vigueur persistante du marché du travail, qui devrait entraîner une hausse des coûts liés à l’inflation. Les marchés se sont rapidement affaiblis et ont chuté de manière substantielle lorsque les nouvelles concernant les faillites bancaires ont été publiées en mars. Il était évident que la Silicon Valley Bank et la Signature Bank ne pourraient pas survivre seules et que quelques autres banques risquaient également de faire faillite. La Réserve fédérale et le Trésor américain sont rapidement venus à la rescousse en garantissant la sécurité des dépôts et en annonçant un nouveau programme, le Bank Term Funding Program (BTFP), qui permet aux banques d’emprunter auprès de la Fed en utilisant leurs participations dans des obligations d’État comme garantie. La crise s’est rapidement résorbée et les marchés boursiers sont repartis à la hausse dans l’espoir que la Réserve fédérale fasse passer la stabilité financière avant la lutte contre l’inflation, ce qui implique une baisse des taux d’intérêt finaux, voire des réductions d’ici à la fin de l’année.
Rendement de l’indice S&P 500 depuis le début de l’année (Source : Bloomberg Finance L.P.)
Les actions sont en hausse, et les obligations aussi, globalement, en raison de l’anticipation d’une baisse des taux. Devons-nous simplement ignorer cette crise bancaire ou y a-t-il une leçon à en tirer? Voici les principaux enseignements que nous pouvons tirer de l’environnement actuel :
1. Toutes les banques dépendent fortement de l’effet de levier pour générer des marges et des bénéfices. Aucune ne disposera rapidement des liquidités nécessaires pour faire face à une ruée sur les banques. Par conséquent, les banques centrales ont un rôle à jouer en cas d’urgence.
2. L’assurance dépôts a une limite; au Canada, elle est de 100 000 dollars. Les banques centrales peuvent imprimer des quantités illimitées de monnaie. Tant qu’elles y sont disposées, l’argent n’est pas un problème !
3. Les obligations d’État et les bons du Trésor constituent l’investissement le plus sûr, car l’emprunteur peut imprimer de l’argent pour vous payer, alors que ce n’est pas le cas des banques.
4. Après les faillites de Bear Stearns, Lehman Brothers et du Crédit suisse, les investisseurs devraient désormais comprendre qu’aucune banque n’est absolument sûre et qu’ils devraient diversifier leurs investissements par pays, par secteur et par noms au sein du secteur. On revient au vieux dicton : « il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier ».
5. Le choc actuel aura probablement des conséquences : a. Les banques seront plus défensives en matière de prêts, ce qui entraînera un resserrement des conditions de crédit, en particulier pour les emprunteurs de moindre qualité. Cela signifie également que le risque de récession dans les six à neuf prochains mois est plus élevé. b. Les déposants trouvent des solutions de rechange aux dépôts, comme les bons du Trésor et les fonds du marché monétaire, pour des intérêts et une sécurité accrus. Cela signifie que les banques peuvent continuer à perdre des dépôts non pas pour des raisons de sécurité, mais pour des raisons de prix.
6. Les banques centrales ont une influence sur le système bancaire et les économies. Elles ont été plus actives ces derniers temps, car il y a eu plus de crises que d’habitude au cours des deux dernières décennies. Le bilan de la Fed a augmenté à chaque fois qu’une crise s’est produite et ne s’est réduit que de façon marginale. Elle s’élève aujourd’hui à 8,7 billions de dollars contre 4 billions de dollars en 2020
La valeur de l’argent est sujette à caution et n’est probablement pas assez remise en question. Le regain d’intérêt pour les lingots d’or et les cryptomonnaies suggère qu’une force croissante se prononce contre les banques centrales. Seront-elles en mesure d’atténuer les risques et de contenir les pertes, ou le système bancaire dans son ensemble subira-t-il d’autres ondes de choc ?
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